La Danse de Roxane
La Danse de Roxane
(par Philippe
Durbecq)
Je tiens à exprimer mon infinie gratitude à Madame Hélène Delavaud Roux,
Maître de conférences à l’Université de Bretagne occidentale, pour le partage
humaniste de son savoir étendu et de sa grande érudition, ainsi que pour sa
parfaite obligeance.
On est libre d’aimer ou de détester le film « Alexandre » d’Oliver Stone, mais peut-on rester insensible à l’exotisme raffiné, à l’ensorcelante mélodie et à l’intense sensualité [1] qui se dégagent de la danse de Roxane [2], un des moments-clés du film ? Cette danse (armée [3]) se déroule sur un tapis de fleurs. Elle se présente comme un mélange de danses soufie [4] iranienne avec des touches de danses indiennes.
Comme un serpent s’enroulant autour d’une branche d’arbre, la flûte enveloppe la base rythmique rapide et hypnotique des percussions et des cymbales à doigts. La harpe, ainsi que le sitar, l’accompagnent dans ce mouvement, ajoutant un ruissellement de notes (glissandi) qui adoucit le son aigrelet de la flûte. C’est un morceau musical enivrant, à l’ambiance orientale, ensorcelant et envoûtant comme une danse de derviche tourneurs.
Arrien ne décrit pas cette danse dans son Anabase. Quinte-Curce évoque, à propos de Roxane « une femme amenée en spectacle au milieu des jeux d'un festin », mais ne parle pas explicitement d’une danse.
En revanche, Plutarque en fait mention (Alexandre,
47, 7-8 (trad. Chambry et Flacelière, CUF) :
καὶ τὰ περὶ Ῥωξάνην ἔρωτι μὲν ἐπράχθη, καλὴν καὶ
ὡραίαν ἔν τινι χορῷ παρὰ πότον ὀφθεῖσαν, ἔδοξε δ´ οὐκ ἀνάρμοστα τοῖς ὑποκειμένοις
εἶναι πράγμασιν.
Ἐθάρρησαν γὰρ οἱ βάρβαροι τῇ κοινωνίᾳ τοῦ γάμου,
καὶ τὸν Ἀλέξανδρον ὑπερηγάπησαν, ὅτι σωφρονέστατος περὶ ταῦτα γεγονὼς οὐδ´ ἧς μόνης
ἡττήθη γυναικὸς ἄνευ νόμου θιγεῖν ὑπέμεινεν.
« En ce qui concerne Roxane, il agit par amour,
car il l’avait trouvée très belle et fraîche, en la voyant dans un chœur de
danse après un festin; mais son mariage avec elle n’en parut pas moins
approprié à ses desseins, car les Barbares, mis en confiance par l’union de
l’une des leurs avec le roi, conçurent pour lui une affection extrême, d’autant
plus qu’en cette occasion, il montra la plus grande continence, même à l’égard
de la seule femme qui l’eut soumis à son empire, et qu’il ne voulut point la
toucher avant de l’avoir légalement épousée. ».
Plutarque ne dit toutefois rien au sujet d'armes
qui seraient utilisées dans la danse de Roxane. Oliver Stone a utilisé des
armes pour cette danse et certaines danses orientales se font avec un sabre, ce
qui a dû l'inspirer. Mais ces danses ne remontent sans doute pas aussi loin que
l'Antiquité.
Dans le film d’Oliver Stone, on constatera également
qu’au début de sa rencontre avec Alexandre, Roxane porte un vêtement qui la
dissimule complètement au regard des autres, mais qu’elle est à visage
découvert lorsqu’elle danse.
À la période achéménide, les reines perses étaient déjà soustraites à la vue du commun des mortels, mais on ne parle pas de voile (Kalymna ou Kalyptra). Plutarque explique, par exemple, quand il décrit le règne d'Artaxerxès II, que la reine Stateira était populaire auprès du peuple car elle voyageait toujours en voiture découverte, sans rideaux et laissait s’approcher les femmes du peuple qui voulaient la saluer [5].
Il ne semble pourtant y avoir aucune preuve de femmes portant des voiles couvrant la tête, ou la bouche datant de la période Achéménide. Néanmoins, il existait une coutume consistant à placer les mains devant la bouche pour éviter de corrompre l'air que le souverain respire. Cette coutume est notamment attestée par un bas-relief de Persépolis qui se trouvait le long des grands escaliers de l’Apadana (l’original est conservé aujourd’hui au musée national de Téhéran), où l'on peut voir un officiel Mède reçu en audience et séparé de Darius, assis sur son trône, par deux grands brûle-encens, porter l'extrémité de ses doigts à la bouche.
Scène de proskynèse (proskynesis) [6] montrant un officier mède reçu en audience par Darius (escalier nord de l’Apadana, original au musée national de Téhéran), photo issue du site Livius (licence : CC 1.0 Universal – créateur : Marco Prins)
Roxane
Roxane était une princesse de Sogdiane (plus ou moins l’Ouzbékistan actuel), pas de Bactriane (dans l’Afghanistan moderne), même si les deux régions étaient deux satrapies contiguës [7] et faisaient partie de la Perse [8] achéménide.
(licence : CC BY-SA 2.5 – auteur : Fabienkhan (travail personnel) – source : https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Carte_empire_ach%C3%A9m%C3%A9nide.png)
Roxane est d’ailleurs un
nom persan (farsi) : Rochanak ou Rochaniâ, « la
Lumineuse », « la petite étoile ». Ce n’est sans doute pas un
hasard si l’astronome Auguste Charlois baptisa de ce nom l’un des 99 astéroïdes
qu’il a découvert en l’honneur de Roxane, la première épouse d’Alexandre le
Grand.
Même si un roman (Le Portrait de Roxane de Philippe Flandrin) évoque la découverte d’une pièce de dix-sept grammes d'or frappée à l'effigie de Roxane, par Alexandre le Grand, aucun portrait, ni monnaie représentant la princesse Roxane ne semble, dans l’état actuel des connaissances, être parvenu jusqu’à nous.
En revanche, des médailles macédoniennes et des médaillons romains [9] existent représentant la reine Olympias chez qui Roxane trouva refuge avec son fils vers la fin de sa vie.
Il faut donc nous tourner vers les peintres de la Renaissance pour trouver des représentations forcément imaginaires de Roxane. Mais pas nécessairement sans aucun fondement historique. Ainsi, une fresque de Giovanni Antonio Bazzi dit le Sodoma de la Villa Farnésine à Rome est une tentative de reconstitution d’un tableau perdu du peintre Echion (également connu sous le nom d’Aetion), peut-être un contemporain d'Apelle, de Protogènes et de Nicomaque. Lucien de Samosate en fait une description dans « Hérodote ou Aétion » :
« Dans une chambre magnifique est un lit
nuptial : Roxane y est assise ; c’est une jeune vierge d’une beauté
parfaite : elle regarde à terre, toute confuse de la présence
d’Alexandre ; une troupe d’Amours voltige en souriant. L’un, placé
derrière la jeune épouse, soulève le voile qui lui couvre la tête, et montre
Roxane à son époux. Un autre, esclave empressé, délie la sandale comme pour
hâter le moment du bonheur ; un troisième saisit Alexandre par son
manteau, et l’entraine de toutes ses forces vers Roxane. Le roi présente une
couronne à la jeune mariée ; près de lui, comme paranymphe, se tient
Héphestion, une torche allumée dans la main, et appuyé sur un beau jeune homme,
que je crois être l’Hyménée [11], son nom n’étant
point écrit. Dans une autre partie du tableau, sont des Amours qui jouent avec
les armes d’Alexandre : deux d’entre eux portent sa lance, comme un lourd
fardeau, et paraissent accablés sous le poids d’un ais ; deux autres
traînent par les courroies le bouclier, sur lequel est assis un troisième, qui
a l’air d’un souverain sur son char ; un dernier s’est glissé sous la
cuirasse qui gît à terre, et il semble épier les autres, pour leur faire peur,
quand ils passeront près de lui [12]. »
(Détail de la photo
précédente)
Alexandre le Grand eut trois épouses : la princesse Stateira II,
fille de Darius III de Perse ; la princesse Parysatis II, fille
d'Artaxerxès III de Perse, cousine de Stateira II ; la princesse Roxane de
Sogdiane qui fut sa première épouse [13].
Après la défaite de Darius, Alexandre capture à Damas (où les nobles de Perse avaient été envoyés par sécurité) la famille de Darius, y compris sa femme, la reine Stateira I (qui était peut-être aussi sa sœur, comme le suggère Justin [14]). Stateira I était réputée être la plus belle femme de toute l’Asie. Alexandre la respecta et la traita avec déférence. Plutarque, Quinte-Curce et Justin prétendent qu’Alexandre ne l’aurait vue qu’une seule fois, au moment de la capture de la famille royale.
Alexandre le Grand avait en outre une maîtresse [15] gréco-perse [16] nommée Barsine [17] (son père était persan et sa mère était grecque). Barsine était
l'épouse de Memnon, le commandant grec, après la mort de Memnon, les historiens
anciens ont écrit une histoire d'amour entre Barsine et Alexandre. Plutarque mentionne
qu’« Alexandre tomba amoureux de sa captive Barsine pour sa beauté ».
Quand Alexandre épouse Roxane, elle quitte l’entourage du roi et se retire avec
son fils Héraclès à
Pergame.
Le garçon aurait été le seul enfant d'Alexandre né de son vivant. Cassandre a assassiné Héraclès en 309 av. J.-C. (il avait 17 ans) sur ordre de Polyperchon, un des généraux d’Alexandre. Auparavant, les Macédoniens avaient également tué Roxane et son fils en 310 av. J.-C.
A gauche, Claire Bloom dans le rôle de Barsine
et Richard Burton dans celui d’Alexandre le Grand, dans le film
« Alexandre le Grand, 1956 – photo dans le domaine public - Popular
Library Inc. Photo from United Artists, producer of the film. – pp.
58-59 Screenland Plus TV Land March 1956 – source : https://en.wikipedia.org/wiki/Barsine#/media/File:Claire_Bloom_Richard_Burton_Alexander_the_Great.jpg) ; à droite l’actrice indienne Riya Deepsi dans le
rôle de Barsine (série « Porus [18] »)
Inutile de dire qu’aucun
des péplums consacrés à Alexandre le Grand ne respecte les ethnies en ce qui
concerne le choix des actrices incarnant les épouses et concubines du
conquérant :
l’actrice Rosario Dawson est née d’une mère d’origine portoricaine et cubaine
et ne correspond évidemment pas au physique de la Roxane historique qui était
une princesse perse, mais d’Asie centrale ; Claire Bloom était
britannique, née d’une famille originaire de Russie et de Lettonie (nom
d’origine : Blumenthal), alors que Barsine était gréco-perse. Toutes
partagent néanmoins ce point commun d’être de très jolies actrices, ce qui, sur
le plan esthétique, correspond évidemment à la description des sources antiques :
« les hommes qui participaient à la
campagne disaient qu'elle était la plus belle femme qu'ils aient vue en Asie, à
la seule exception de la femme de Darius [, sa mère]. Alexandre est tombé
amoureux d'elle à vue ; mais, toute captive qu'elle était, il refusa, malgré
toute sa passion, de la forcer à sa volonté, et condescendit à l'épouser » (Arrien [19]).
Le
mariage d’Alexandre et de Roxane
C’est
après que ses soldats se soient emparés de la « roche des Sogdiens [20] » qu’Alexandre
rencontre Roxane.
« Parmi les
prisonniers on compta un grand nombre de femmes et d'enfants entre autres ceux
d'Oxyarte ; l'une de ses filles, Roxane, nubile depuis peu était la plus
distinguée des beautés de l'Asie, après la femme de Darius. Alexandre en est
épris, et loin d'user des droits du vainqueur sur sa captive, il l'élève au
rang de son épouse, action bien plus digne d'éloge que de blâme. »
(Arrien, IV, 19).
Les détails du mariage (qui s’est déroulé en
327) sont relatés en particulier par Quinte-Curce (Histoires, Livre VIII, chap. 4), qui est le seul à décrire avec précision les détails de la
cérémonie :
« Il (le satrape) avait préparé, pour
recevoir le roi (Alexandre), un festin où régnait toute la magnificence
asiatique. (23) Occupé d'en faire les honneurs avec beaucoup de recherche, il
fit amener trente jeunes vierges de nobles familles, et parmi elles sa propre
fille, nommée Roxane, qui, à une beauté merveilleuse, unissait des grâces bien
rares chez les Barbares. (24) Quoique environnée d'une troupe de beautés
choisies, elle attira sur elle tous les regards, ceux du roi surtout, qui déjà
ne commandait plus si bien à ses passions au milieu des faveurs de la fortune,
dont les mortels ne savent jamais assez se garder. (25) Aussi ce même prince
qui avait vu l'épouse de Darius et ses filles, auxquelles nulle femme, hormis
Roxane, ne pouvait être égalée en beauté, sans éprouver d'autres sentiments que
ceux d'un père, se laissa-t-il aller à un fol amour pour une jeune fille de
bien humble naissance auprès de l'éclat du sang royal; et on l'entendit dire
hautement qu'il importait à l'affermissement de son empire que les Macédoniens
et les Perses se mêlassent par des mariages; que c'était le seul moyen d'ôter et
la honte aux vaincus et l'orgueil aux vainqueurs. (26) Achille même dont il
descendait, ne s'était-il pas uni à une captive ? Qu'on se gardât donc de
croire qu'il se déshonorait en voulant contracter une pareille alliance. (27)
Le père accueillit ses paroles avec les transports d'une joie inespérée ; et le
roi, dans l'entraînement de son ardente passion, fit apporter un pain, selon la
coutume de son pays : c'était là, chez les Macédoniens, le gage le plus sacré
de l'union conjugale : on le coupait en deux avec une épée, et chacun des
futurs époux en goûtait. (28) Sans doute les premiers législateurs de cette
nation, en choisissant cet aliment simple et peu coûteux, ont voulu enseigner à
ceux qui associent leur fortune, de combien peu ils doivent se contenter. (29)
C'est ainsi que le maître de l'Asie et de l'Europe s'unit par le mariage à une
femme amenée en spectacle au milieu des jeux d'un festin, et que, du sein d'une
captive, dut naître l'héritier destiné à régner sur un peuple de vainqueurs.
(30) Ses amis avaient honte de le voir, au milieu des vins et des mets, se
choisir un beau-père dans la nation conquise ; mais toute liberté ayant disparu
depuis le meurtre de Clitus, ils donnaient l'air de l'approbation à leur
visage, l'instrument de flatterie le plus complaisant. ».
Etait-ce un mariage d'amour ou une alliance politique comme le suggérait Plutarque [21] ? Il ne faut pas être manichéen et les deux ne s’excluent pas, surtout si le but est noble : celui de réaliser, au travers de ce mariage, un rêve d’universalité et non un prosaïque « mariage d’argent [22] » : ce mariage était conforme à la politique d'Alexandre de rapprocher (ce qui ne signifie pas unir) les cultures grecque et perse, ou du moins leurs élites [23]. Alexandre insistera d’ailleurs pour que ses commandants (y compris son amant Héphaistion) prennent des épouses persanes lors des fameuses noces de Suse, en 324, un mariage collectif d’une très grande ampleur puisqu’elles concernaient 10.000 Macédoniens.
Rompre le pain ensemble est une coutume macédonienne. Cette
communion alimentaire rappelle le rituel de
la confarreatio, qui est décrit par Gaius, confirmé par Ulpien [24], bien
que l’on ne sache pas si les époux goûtaient ou non au gâteau d’épeautre.
Pourquoi du pain et pas un autre aliment ?
« Sans doute les premiers
législateurs de cette nation, en choisissant cet aliment simple et peu coûteux,
ont voulu enseigner à ceux qui associent leur fortune, de combien peu ils
doivent se contenter [25]. »
La forme du pain était « vraisemblablement
ronde [26] »
et donc pas allongée comme dans le film « Alexandre » d’Oliver Stone.
On peut donc comparer le pain qui a dû être servi au mariage d’Alexandre et de
Roxane comme ayant plutôt l’apparence de ces pains retrouvés à Pompéi [27].
On peut comparer ce rituel à la confarreatio romaine dans laquelle intervient un pain d’épeautre [28].
Poursuivons avec le rituel macédonien : ce
pain, en principe rond, devait être tranché en deux à l’aide d’un glaive [29]
avant que les époux n’en goûtent rituellement les moitiés.
Il est fort probable qu’Alexandre, lors de sa cérémonie de mariage avec Roxane, ait employé sa propre épée à cet effet, la kopis [30], une arme utilisée dans la cavalerie macédonienne (les phalangistes et les hoplites avaient un couteau plus court, le xiphos) [31].
Illustration d’une kopis (Licence : CC
BY-SA 4.0 – Auteur : Auge=mit – source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Kopis#:~:text=Le%20kopis%20(en%20grec%20ancien,est%20parfois%20compar%C3%A9%20au%20khukuri)
Comme le dit Quinte-Curce : « cette arme noble, qui intervient souvent dans les cérémonies du genre, était bien à la mesure de cette solennelle occasion ».
Dans leur article « A propos du mariage d’Alexandre et de
Roxane », Marcel Renard et Jean Servais nous éclairent sur l’utilisation
du glaive : « Dans la plupart des folklores et des magies, glaives,
épées et couteaux jouent un rôle apotropaïque : instruments tranchants et
piquants, ils blessent les démons, les mauvais esprits, les morts errants, tous
ceux qui viennent rôder dans l’intention de nuire, et par conséquents ils sont
utilisés pour les écarter. (…) En Grèce, on enfermait un couteau dans le
mât des bateaux pour les préserver des λάμιαι et des tempêtes ».
Selon la légende, Alexandre le Grand gardait deux choses sous
son oreiller : un poignard et une copie de l'Iliade d'Homère. On le voit
également dans le film d’Oliver Stone : Alexandre passe les volumina
de l’Iliade sur son visage et Roxane découvre le couteau.
La
mort de Roxane
Alexandre
le Grand ne vit pas très vieux. Il va mourir d’épuisement [32] à l’âge de 33 ans et, au
moment de sa mort, son épouse Roxane porte le fruit de leurs amours, un fils,
Alexandre IV de Macédoine [33], qui naîtra de manière
posthume pour son père, quoique cet enfant fût pratiquement déjà roi in utero [34]. Quatre ans à peine se seront écoulés entre le mariage avec Roxane et la mort d'Alexandre.
Pendant les treize années qui vont suivre, l'enfant-roi
est ballotté entre différents diadoques [35], qui se disputent sa
garde comme un gage sur la royauté macédonienne apportant une légitimité à
leurs ambitions politiques.
Par ailleurs, après la mort d'Alexandre, Roxane s'était alliée avec la reine-mère Olympias contre Philippe III et son épouse Eurydice qui furent éliminés, puis s’était placée sous la protection de Polyperchon, le successeur d'Antipater à la régence de Macédoine de 319 à 317, mais Polyperchon se rallie à Cassandre. Roxane se réfugie alors avec son fils à Pydna [36] pour échapper à ce dernier [37].
Après la prise de cette ville et le meurtre
d'Olympias en 316 av. J.-C. (elle est
lapidée par des proches de ses victimes), Roxane est
enfermée avec son fils dans la citadelle d'Amphipolis en Macédoine [38]. Cassandre, épimélète (intendant des
finances) depuis le traité de paix de -311, les fait
mettre à mort en -310, laissant vacant le
titre de roi de Macédoine jusqu'en -305, date à laquelle il se fait proclamer
roi.
La paix de -311 entre les diadoques stipulait en effet
que Cassandre ne resterait épimélète du roi que jusqu'à la majorité d’Alexandre
IV, une clause qui scellait ipso facto le destin du jeune monarque :
pour rester en place, Cassandre devait l’éliminer au plus vite.
Cependant, Polyperchon
entre de nouveau en conflit contre lui. Polyperchon prend sous sa
protection Héraclès, le fils illégitime d’Alexandre et de Barsine, et le
présente comme un successeur potentiel. Cassandre, plutôt que de s’engager dans
un combat au succès incertain propose à Polyperchon un marché consistant à conserver
ses possessions. En 309, le jeune Héraclès et sa mère, Barsine,
périssent empoisonnés sur l'ordre de Polyperchon qui tente ainsi d’obtenir les faveurs
de Cassandre.
La tombe dite « du Prince », à Vergina [39], pourrait très probablement être celle d'Alexandre IV : les cendres qui y ont été découvertes dans une hydrie funéraire en argent appartiennent à un jeune garçon de 13 à 16 ans (l'âge d'Alexandre IV à sa mort), et la datation du matériel archéologique permet d'établir une datation entre 330 et 290 av. J.-C environ, ce qui correspondrait également avec l’époque du décès d’Alexandre IV (311 ou 310 av. J.-C.).
Inauguré en 1993, le Musée
des Tombes royales d’Aigai (Vergina) a été bâti à l’intérieur du
tumulus, mais sur les tombes royales afin de pouvoir les maintenir in situ et
de conserver au « Grand tumulus » de Vergina sa forme initiale (celle
qu’il avait avant les fouilles). On y dénombre quatre
tombes et un petit temple (héroon). L’entrée aux tombes royales se fait
par une rampe et un long couloir dans la pénombre : la scénographie nous
invite à entrer au royaume d’Hadès.
A gauche, le
« Grand tumulus » dans lequel sont enfouies les tombes de
Philippe II et, très probablement, d’Alexandre IV ; à droite, l’entrée des
tombes royales de Vergina (Licences : respectivement CC BY 3.0 et CC BY-SA
3.0 - Auteurs : Astaldo (travail personnel) et Colin W –
source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Tombe_de_Philippe_II_de_Mac%C3%A9doine)
La tombe du Prince est
ornée d'une frise peinte représentant une course de chars, dont l’un des
protagonistes pourrait être le jeune prince assassiné.
Quant à Olympias et Roxane, les
scientifiques n'ont toujours pas découvert leur tombe, même si le site
d’Amphipolis alimente toutes les spéculations.
Vue 3D de la tombe
d’Amphipolis (Licence : CC BY-SA 4.0 - auteur : Magikos
fakos http://greektoys.org/ (travail personnel) – source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Tombeau_d%27Amphipolis)
La danse amoureuse de
Roxane se termine donc par une double tragédie, mêlant tout ce que l’homme peut
avoir de meilleur en lui ou de plus mauvais, ce qui est bien grec comme
épilogue.
Philippe Durbecq
Bibliographie
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- Claire PREAUX, Le Monde hellénistique. La Grèce et l’Orient, PUF, Coll. Nouvelle Clio, 2002.
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- QUINTE-CURCE, L'Histoire d'Alexandre le Grand (URL : http://agoraclass.fltr.ucl.ac.be/concordances/intro.htm#quin).
- Marcel RENARD et Jean SERVAIS, A propos du mariage d’Alexandre et de Roxane, L’Antiquité classique, année 1955, 24-1, pp. 29-50 (URL : https://www.persee.fr/doc/antiq_0770-2817_1955_num_24_1_3251).
- Michel ROSTOVTSEFF, Histoire économique et sociale du monde hellénistique, Coll. Bouquins, chez Robert Laffont, 1988.
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- Edouard WILL et Claude MOSSE, Le Monde grec et l’Orient, Tome II, Le IVe siècle et l’époque hellénistique, PUF (Peuples et civilisations), 1993.
- XENOPHON, Anabase et Cyropédie (traduction Remacle – URL : http://remacle.org/bloodwolf/historiens/xenophon/index.htm).
- XENOPHON, De l’Art équestre, Les Belles Lettres, 1978.
- Sitographie
- Extrait de la bande musicale du film « Alexandre » d’Oliver Stone : https://www.youtube.com/watch?v=mkayu6dgMQs
(Maria
Bildea · Irina Valentinovna Karpouchina · Konstantinos Paliatsaras ·
Vanessa- Mae Vanakorn Nicholson · Epirus Polyphonic Ensemble. Chef
d’orchestre : Nic Raine)
- https://www.alexandrelegrand.fr/site_fr/alexandre-le-grand-et-les-femmes-le-mariage-avec-roxane-princesse-perse.phphttps://faceiran.fr/roxane/
[1] Cette danse n’est pas sans évoquer
celle de Salomé dans la Bible, la funeste danse des sept voiles qui entraîne la
décapitation de Jean-Baptiste (Selon Matthieu 14 et Marc 6, car
Flavius Josèphe ne fait mention d’aucune danse dans ses Antiquités juives). Extrait
du film d’Oliver Stone : https://www.youtube.com/watch?v=3xlJMavnO-g.
[2] Toute la chorégraphie de cette
danse est décrite dans le documentaire « Dancing for Oliver »
réalisé par Suzanne Gielgud, l’épouse du chorégraphe britannique Piers Gielgud
(voir l’article https://fr.wikipedia.org/wiki/Dancing_for_Oliver) sur le travail
de son mari et des danseurs.
[3] Les danseuses tiennent une dague en main. Cette danse rappelle
donc également, par certains côtés, les danses armées
antiques en Orient. Cf. le passage de Xénophon, Anabase IV, 7, 16 sur
les danses armées de Chalybes dès qu'ils sont en vue de l'ennemi, puis V, 4, 14
et V, 4, 17, les danses armées des Mossynèques, ainsi que VI, 4, 10 le
spectacle de danses armées où figure une persique effectuée par un Mysien avec
deux boucliers. C'est la même danse qu'effectue le roi de Perse le jour de
la fête de Mithra. Pour plus de détails à ce sujet, voir Hélène Delavaud-Roux,
« Les Grecs à la découverte de l'Orient à travers l'Anabase de Xénophon », pp.
89-125, 114, 116-117, 118-120.
[4] Il s'agit de danse soufie iranienne.
Ce type de danse a pu inspirer Oliver Stone. Mais ce sont généralement des
pratiques plutôt réservées aux hommes. Le lien https://danse-soufie.com/rana-gorgani-2/ renvoie vers une femme qui pratique
cette danse. Il n'est pas du tout certain que ce type de danse ait existé à
l'époque d'Alexandre. L'origine de la danse soufie est plutôt médiévale. Je
dois ces indications à Madame Hélène Delavaud Roux que je remercie vivement.
[5] Plutarque, Artaxerxès, 5 et Xénophon, Cyropaedia, 6,4,11. Voir aussi les travaux de Madame Nathalie Martin sur la question du voile en Grèce ancienne.
[6] Littéralement « envoyer un baiser vers »
[7] Elles étaient séparées par le
fleuve Oxus (Strabon, Géographie, Livre XI.11)
[8] La Perse est un nom grec pour l'Iran. En langue
persane, les Perses ont toujours appelé leur pays l'Iran. Iran signifie
« le pays des Aryens », les Perses/Iraniens sont des Aryens. IRAN est
l'ancien nom de la Perse dans la langue persane et la littérature persane, il
vient de IRANSHAHR.
[9] Cette pièce fait
partie d'une série de grands médaillons en or trouvés à Aboukir en Haute-Égypte
qui ont été commandés pour honorer l'empereur Caracalla, le représentant comme
le descendant d'Alexandre le Grand et le comparant également à Achille (le
verso montre une « néréide », peut-être Thétis, la mère d'Achille, chevauchant
un hippocampe). Voir le site https://art.thewalters.org/detail/35838/medallion-with-olympias/.
[10] Qu’ils soient félicités ici
pour cette ouverture d’esprit.
[11] Le dieu protecteur du mariage.
[12] Lucien de Samosate (trad. Eugène Talbot), « Hérodote ou
Aétion »,
dans Œuvres complètes, t. 1, Hachette, 1866 (https://fr.wikisource.org/wiki/H%C3%A9rodote_ou_A%C3%A9tion).
[13] Alexandre se
marie avec la fille de Darius III, Stateira II et avec Parysatis II, pendant
les noces de Suse en 324, Roxane qui était alors enceinte d’Alexandre fait
une fausse couche. De concert avec Perdiccas, elle fait
étrangler Stateira II, fille de Darius III et seconde épouse
d'Alexandre. Elle fait alors reconnaître son propre fils comme héritier du
trône sous le nom d'Alexandre IV. Ne pas confondre Stateira I, l’épouse de
Darius III et Stateira II, sa fille.
[14] Justin, Abrégé
des Histoires philippiques de Trogue Pompée, 11, 9. (URL : http://www.forumromanum.org/literature/justin/).
[15] En réalité, ni maîtresse, ni concubine (du moins
dans la conception grecque de l’hétaïre), sa position était presque celle d’une
reine (« une femme du roi »), avec tout le prestige qui lui était attaché,
et une certaine influence politique. Son statut était donc respectable. Voir
Pierre Briant, Histoire de l'Empire
perse de Cyrus à Alexandre.
[16] Elle était l'aînée des dix
filles du satrape perse Artabaze et d'une Grecque originaire
de Rhodes.
[17] Attention aussi, Barsine est
parfois confondue avec Stateira II, épouse d'Alexandre, et qui peut aussi
avoir été appelée « Barsine » (Plutarque, Diodore, Curtius Rufus,
Justin et Pausanias).
[18] Série télévisée racontant la vie du guerrier
et souverain indien Porus, roi du royaume des Pauravas (ancienne
dynastie de l’Indus) et d'Alexandre le Grand.
[19] Lucius Flavius Arrianus,
mieux connu sous le nom d' Arrien, était un historien grec du IIe siècle après J.-C,
qui a servi comme commandant militaire dans l'Empire romain. Arrien a eu la
chance d’avoir en main la biographie d’Alexandre écrite par Ptolémée. Les
récits des historiens contemporains (Callisthène, Onésicrite, Nearchus et
Aristobulle) ne nous sont parvenus que sous forme de fragments. Ce que nous
savons aujourd'hui a été enregistré par une poignée d'écrivains anciens (Diodore, Curtius Rufus et Plutarque principalement) qui avaient encore accès à ces
anciens documents, et Arrien est l'un de ces écrivains.
[20] Voir Arrien, Livre IV, chapitre
18 : « La prise de ce poste enlevait aux Sogdiens leur dernier
boulevard. Alexandre s'approche mais il ne voit de tous côtés qu'une hauteur escarpée,
couverte de neige ; inabordable. Les Barbares étaient approvisionnés pour un
long siège, et ne manquaient point d'eau. Alexandre leur fait proposer d'entrer
en composition, avec la facilité de se retirer chez eux ; mais les Barbares se
prenant à rire, lui demandent si ses soldats ont des ailes ; qu'ils se
croyaient au-dessus de toute atteinte. Irrité de cette réponse superbe,
Alexandre, pour satisfaire à la fois sa vengeance et sa gloire, résolut
d'emporter la place. Il fait publier par un héraut, que le premier de tous qui
montera à l'assaut obtiendra douze talents ; le second, le troisième et tous
ceux qui leur succéderont, des récompenses proportionnées, jusqu'au dernier,
qui recevra trois cents dariques. Des Macédoniens, excités à la fois par leur courage et la récompense, se présentent au
nombre de trois cents, choisis parmi ceux exercés à ces sortes de travaux. Ils
sont armés de crampons de fer qu'ils doivent ficher clans la glace ou dans la
roche, et auxquels ils attachent de fortes cordes. Se dirigeant pendant la nuit
du côté le plus escarpé et le moins gardé, à l'aide de ces crampons et
d'efforts redoublés, ils arrivent de différents côtés sur le sommet. À cet
assaut, trente roulèrent dans les précipices et dans les neiges ; on ne put
retrouver leurs corps. Arrivés sur le sommet, les Macédoniens élèvent un
drapeau, c'était le signal convenu. Alexandre députe un héraut vers les postes
avancés des Barbares pour leur annoncer qu'ils aient à se rendre ; que ses
soldats ont des ailes ; qu'ils lèvent les yeux, les hauteurs sont occupées par
les Macédoniens. À cet aspect imprévu, s'imaginant que les assaillants étaient
en plus grand nombre et mieux armés, les Barbares se rendirent. ».
[21] « Quant à son mariage avec Roxane,
dont la jeunesse et la beauté l'avaient charmé lors d'une soirée arrosée, où il
la vit pour la première fois participer à une danse, il s'agissait bien d'une
histoire d'amour, mais qui semblait en même temps propice à l'objet qu'il avait
en main. Car cela faisait plaisir au peuple vaincu de le voir choisir une
femme parmi eux. »
[22] Bien qu’Alexandre eût besoin de
l’or perse, ne fût-ce que pour payer sa flotte qui ravitaillait son armée.
[23] Contrairement à ce qu’a prétendu l’historien helléniste allemand du XIXe siècle Johann Gustav Droysen, il n’y a pas eu de fusion entre les Grecs et les populations indigènes. Droysen soutenait que les cultures grecque, d’une part, et orientale, d’autre part, s’étaient harmonieusement confondues in fine et avaient donné naissance à une nouvelle civilisation gréco-orientale qui aurait été la civilisation hellénistique (c’est lui d’ailleurs qui forge le terme « hellénistique », l'appliquant à la période allant de la mort d'Alexandre (323 av. J.-C.) jusqu'au suicide de Cléopâtre VII (30 av. J.-C.). Or, dans le courant du XXe siècle, de nombreux travaux ont montré que cette vue était trop idyllique et idéaliste et que, bien au contraire, les Grecs (les Macédoniens plus particulièrement) étaient restés à l’écart des cultures orientales et n’avaient pas cherché à comprendre celles-ci. Il y avait même un certain dédain des Grecs : ils se sentaient très supérieurs face à ces populations et vivaient entre eux, séparément (il n’y avait pas de mariages mixtes ou très rarement). On peut comparer cette situation aux « gated communities » (résidences fermées) aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, et à la sécession urbaine (compartiments dans les villes) avec la création d’enclaves ethniques dans certains tissus urbains comme les ghettos, Chinatown, Little Sicily ou Harlem. Il y a donc une révision totale de l’idée qu’on en avait précédemment. En revanche, les élites des populations conquises par Alexandre le Grand, pour maintenir leur pouvoir localement et pour essayer d’être bien vus par le conquérant macédonien ont cherché à imiter, à s’adapter à la culture grecque. Donc, le mouvement n’est pas venu des Grecs mais des élites locales dans un but essentiellement opportuniste. S’il y a eu influence et contact, c’est pratiquement uniquement dans le domaine religieux. Les Macédoniens ne sont pas parvenus à réaliser ce que les Romains ont réussi à faire, en étendant leur système politique et la citoyenneté à l’ensemble des territoires qu’ils avaient conquis : les indigènes ne seront jamais des citoyens grecs et ne participeront jamais à la vie politique des cités.
[24] Institutes, I, 112 et
9.1.
[25] Quinte-Curce
- Histoire d’Alexandre, Livre VIII.
[26] Marcel
Renard et Jean Servais, A propos du mariage d’Alexandre et de Roxane, p.
35. Dans les Deipnosophistes d’Athénée de Naucratis (Livre XI,
489d), celui écrit que « Les anciens, qui, les
premiers, ont appris aux hommes à quitter la vie sauvage pour prendre une
nourriture plus douce, s'étant persuadés que le monde était rond, et prenant
des idées claires d'une rotation continuelle, d'après la forme du soleil et de
la lune, crurent aussi devoir donner à tout ce qui servait à la vie une forme
analogue à celle de l'espace infini qui embrassait la terre. C'est pourquoi ils
ont donné une forme ronde à la table, aux trépieds consacrés aux dieux, [489d] aux gâteaux qu'ils
leur offraient, et qu'ils parsemaient d'étoiles, les appelant en même temps
lunes. Ils ont appelé le pain artos, qui veut dire parfait, parce
que de toutes les figures, le cercle est la seule parfaite dans toutes ses
parties. ».
[27] Dans les temps anciens,
les Romains consommaient leurs céréales uniquement sous forme de
bouillies, et ils considéraient le pain comme une spécialité grecque. Quant aux
Grecs, tout comme les Anglais aiment brocarder les Français en les appelant « Frog eaters »,
ils nommaient les Romains les « mangeurs de bouillies ». D'abord
préparé à la maison, le pain fut ensuite fabriqué par les boulangers. Au IIe
siècle av. J.-C., cet usage se répand avec l’installation de
boulangers (pistores) grecs à Rome (on compte une trentaine de boulangeries,
appelées pistrina, à Pompéi et sous le règne d'Auguste, 329
boulangeries à Rome). Voir Michèle Barrière,
« Le pain », Historia, novembre
2011, p. 10.
[28] La confarreatio est l’une des trois formes juridiques par
lesquelles la femme romaine pouvait se placer sous l’autorité juridique de son
mari. Le nom de cette cérémonie vient justement du pain d’épeautre (farreus panis,
selon le juriste et professeur de droit Gaius (Institutes, I, 112), farreum, d’après Festus grammaticus). Nous ignorons
toutefois la teneur des formules solennelles qui étaient prononcées en cette
occasion ni si le pain était partagé par les futurs époux ou s’il constituait
uniquement une offrande au dieu Jupiter.
[29] Marcel Renard et Jean Servais, A
propos du mariage d’Alexandre et de Roxane, p. 34.
[30] En grec ancien κοπίς / kopis, ce qui signifie « hachoir » (son nom serait dérivé du khépesh égyptien). Autrement dit, cette épée lourde avec une lame incurvée (une courbe rentrante et une courbe sortante) à un seul tranchant, était utilisée de préférence de taille, mais pouvait l’être également d’estoc. La kopis a une apparence proche de la falcata, cette épée en fer d’Ibérie, qui est contemporaine de la kopis. Comme le fait remarquer à juste titre dans sa conclusion l’auteur de l’article « Types d’épées grecques antiques » du 29.10.2002 (https://www.greecehighdefinition.com/blog/2022/10/29/types-of-ancient-greek-swords), « bien que les lances aient été très mises en avant dans les batailles de la Grèce antique, les épées étaient également vitales car elles étaient utilisées comme armes secondaires. ». Voir aussi Peter Connolly, L’armée grecque, page 61 et surtout Fernando Quesada-Sanz, « Machaira, kopis, falcata », pages 88 à 92.
[31] Dans son Art équestre (chapitre XII, 11), Xénophon écrit très clairement qu’il préfère la kopis au xiphos (« le sabre à l’épée » dit le traducteur), car « un coup de taille, porté de la hauteur du cavalier [ce qu’était Alexandre], vaut mieux qu’un coup d’estoc ». Mais il faut être attentif au fait que le mot kopis se rencontre déjà dans le théâtre grec notamment chez Sophocle – comme me l’a judicieusement fait remarquer Madame Hélène Delavaud Roux. Il ne s’agit donc pas d’un objet spécifiquement macédonien. Le terme désigne alors le couteau de sacrifice ou de cuisine. Cependant, les Grecs utilisaient aussi ce mot pour désigner l’épée courte et tranchante des Orientaux comme on le constate dans la Cyropédie du même Xénophon (et les mercenaires grecs peltastes de Cyrus le jeune en semblent aussi équipés). Enfin, Fernando Quesada-Sanz (op. cit.) attire également l’attention sur le fait qu’il faut prendre garde également de l’apparente synonymie de machaira et kopis dans l’esprit de Xénophon. Autrement dit, la plus grande prudence s’impose dans l’emploi de cette appellation.
[32] En fait, la cause de la mort d'Alexandre le Grand est inconnue. On a évoqué la maladie bien sûr (en particulier le neuropaludisme ou le coma éthylique), mais cette thèse est peut-être destinée à éloigner celle de l'assassinat politique (avec un poison versé par Iolas, le fils du régent de Macédoine, Antipatros qui venait de se faire démettre de ses fonctions ou même par d'autres Macédoniens, soit lassés de la soif inextinguible de conquêtes d’Alexandre, soit furieux que celui-ci ait recruté des milliers de soldats perses, leurs anciens ennemis). On peut aussi envisager la possibilité d'un empoisonnement accidentel en forçant la dose d'un médicament à base d'hellébore. Diodore de Sicile est le seul qui parle de l’intervention des médecins. Les Éphémérides royales, journaux dans lesquels Eumène de Cardia et Diodote d’Érythrée consignaient jour après jour tous les événements (au moins dans les extraits qui nous ont été conservés par Arrien et Plutarque) omettent toute mention des médecins et des secours médicaux : elles ne parlent que des sacrifices qu’Alexandre fit régulièrement.
[33] Voir l’article https://fr.wikipedia.org/wiki/Alexandre_IV_de_Mac%C3%A9doine.
[34] Mais pas forcément car le bébé
aurait pu être une fille ! Il fallait donc attendre la naissance pour connaître
son genre.
[35] Le mot vient de
διά / diá (« par ») et δέχομαι / dékhomai (« recevoir »), c'est-à-dire,
littéralement, « celui par qui le sceptre est transmis ». Ne pas confondre avec
les Epigones, du grec ancien ἐπίγονος, epígonos (« descendant,
né après »), qui est le nom donné aux fils et successeurs des diadoques.
[36] Ville de Macédoine célèbre dans l’histoire pour avoir été le lieu de la défaite ultime des Macédoniens face aux Romains.
[37] Diodore, Bh,
XIX, 11.
[38] Diodore, Bh, XIX, 16.
[39] Vergina est l’antique Agai, une
des deux capitales que connut la Macédoine (l’autre étant Pella). Selon la
tradition en effet, il était dit que les souverains macédoniens règneraient sur
leur empire tant qu’ils seraient enterrés à Agai.
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